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Colombie Romans

La chienne – Pilar Quintana

Traduction de l’espagnol (Colombie) par Laurence Debril – Calmann-Lévy

Voilà un très court roman (128 pages) que j’ai lu presque d’une traite, envoûtée que j’étais par l’atmosphère tissée par Pilar Quintana.

Sur la côte pacifique de la Colombie, Damaris et Rogelio vivotent dans une cabane grâce aux quelques sous gagnés au prix de campagnes de pêche plus ou moins fructueuses et de ménages. En mal d’enfant, ils se sont éloignés et, depuis plusieurs années, ne font plus que cohabiter. Sur un coup de tête, Damaris adopte un jour une petite chienne à laquelle elle s’attache sans doute plus que de raison. Après une première fugue, celle-ci prend goût à la liberté et s’échappe à la première occasion. Ces abandons font passer Damaris par toute une palette d’émotions, des plus douces aux plus féroces.

C’est bien Damaris que l’on suit, et sa ou plutôt ses douleurs qui se dévoilent au fil de retours dans le passé. Mais Pilar Quintana nous parle aussi de Rogelio, bien moins fruste qu’au premier abord, et de toute une petite communauté accrochée à ce bord de mer hostile. Tous ces personnages m’ont paru extrêmement seuls, à commencer par Damaris bien sûr, une impression renforcée par leur isolement géographique. Les tempêtes, la chaleur, la mer, la jungle et sa faune, bref, la nature est également omniprésente dans ce roman. Et elle n’y est pas généreuse, mais impitoyable et menaçante.

La chienne est un roman resserré, au style sobre et poignant à la fois. Très fort et dépaysant, il se lit vite mais ne s’oubliera pas facilement.

PS : Koryfée, dont je viens de découvrir le blog, l’a aimé aussi. Sa chronique est à retrouver ici (avec en prime son adorable toutou en photo !).

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Allemagne Romans

L’amour par temps de crise – Daniela Krien

Traduction de l’allemand par Dominique Autrand – Éditions Points

Enfin novembre ! Contrairement à beaucoup, j’aime ce mois de l’année avec ses odeurs de sous-bois humide, ses longues soirées qui promettent de belles séances de lectures, ses après-midi chocolat chaud à gogo, et cerise sur le gâteau : c’est aussi le rendez-vous des Feuilles allemandes ! Merci à Et si on bouquinait et à Livr’escapades de nous inviter à explorer la littérature germanophone, qu’elle vienne d’Allemagne, d’Autriche, de Suisse ou d’ailleurs. Je sens que je vais me régaler !

Pour ouvrir ce mois germanophile, j’ai lu L’amour en temps de crise, attirée que j’étais par ce beau titre et le joli succès que s’est taillé ce roman allemand à sa sortie en 2019. Daniela Krien nous plonge dans quelques années de la vie de 5 femmes âgées d’une trentaine à une quarantaine d’années. Certaines ont des enfants, d’autres non. Certaines ont un amant, d’autres plusieurs, d’autres pas. Ce qui les relie ? Elles vivent toutes à Leipzig, en ex-RDA, et se connaissent directement ou par personne interposée, parfois juste de vue. En femmes de leur temps, Paula, Judith, Brida, Malika et Jorinde essaient de tenir debout face aux multiples injonctions bien lourdes à porter qu’elles subissent.

L’autrice décrit avec précision et justesse les premiers temps de la passion amoureuse, le bouleversement que représente la maternité, le choix ou la souffrance de ne pas avoir d’enfant, les relations d’emprise qui peuvent se tisser au sein du couple ou au détour d’une amitié, les séquelles laissées par un modèle parental ou éducatif bancal, le déchirement d’une rupture… Les souvenirs d’une enfance au temps de la RDA ainsi que les préjugés et incompréhensions qui persistent entre Allemand(e)s de l’Est et l’Ouest transparaissent également dans ces portraits sans fard de femmes contemporaines.

L’œuvre de Johann Sebastian Bach, indissociable de Leipzig, traverse ce roman. Image par scholacantorum de Pixabay

On s’identifie facilement à certaines facettes de ces 5 femmes. Tout chez elles n’est pas d’ailleurs pas sympathique, ce que j’ai apprécié car elles nous apparaissent ainsi sous un jour nuancé, réaliste et d’autant plus humain. Elles savent aussi réinventer les modèles de vie qu’on cherche à leur imposer. Les hommes sont en revanche présentés soit comme faibles, égoïstes, donneurs de leçons voire destructeurs, soit parfaitement à l’écoute, sensibles et attentionnés. J’aurais aimé un peu plus d’objectivité et de finesse sur cet aspect. Ce sera ma seule réserve pour ce roman qui saisit très bien l’air du temps et la psyché féminine.

PS : De Daniela Krien, Eva a également lu Un jour nous nous raconterons tout et L’incendie. Ils rejoindront sûrement ma PAL très bientôt.

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Norvège Romans

Une famille moderne – Helga Flatland

Traduction du norvégien par Dominique Kristensen – Éditions de l’Aube

Ne vous fiez pas à la quatrième de couverture de ce roman norvégien et surtout aux commentaires de la presse qu’elle cite ! Elle annonce une lecture drôle (« hilarant dès la première page »), légère, et ce n’est pas du tout ce que nous propose en réalité « Une famille moderne ». Peu importe, parce qu’une fois qu’on l’a commencé, on a très envie de suivre cette famille d’Oslo au bord de l’implosion.

On retrouve bien ici le côté addictif de la littérature feel good avec les sentiments au premier plan et une construction chorale qui met en lumière les fragilités et les traits de caractère de chacun(e) des frère et sœurs. On s’identifie facilement à Liv, Ellen ou Håkon (et même aux trois à la fois), chamboulé(e)s par le divorce sur le tard (ils ont 70 ans) de leurs parents. Même si on n’a pas vécu cet événement précisément, il est révélateur comme peut l’être un deuil ou une autre « crise ». Les lecteurs et lectrices se reconnaîtront donc aisément dans certaines réactions ou dans les tempéraments de ces trois personnalités très différentes et pourtant complices.

Retrouvez d’autres lectures nordiques chez Céline !

J’avoue avoir été agréablement surprise par le côté chaleureux et communicant de cette famille norvégienne. À force de lire des polars « venus du froid », j’ai fini par imaginer les habitant(e)s des pays nordiques comme des gens taiseux, renfermés et peu expressifs. C’est un peu idiot et il était temps pour moi de voir les Norvégiens d’un autre œil ! La « famille moderne » que l’on côtoie ici n’est pas aussi parfaite qu’elle le semble au premier abord, est pleine de doutes et s’aime énormément. Elle va évoluer, pas forcément comme elle l’aurait souhaité ou imaginé, mais en ayant indéniablement mûri.

Image par Anemone123 de Pixabay

Si vous cherchez un roman pour rire aux éclats, ce n’est pas vraiment, voire vraiment pas, le bon choix. Sinon, sachez qu’on a du mal à le reposer, que Helga Flatland et sa traductrice ont une plume très fluide et qu’on est un peu triste de quitter cette famille attachante. C’est une lecture légèrement douce-amère, donc parfaite pour l’été (selon mes critères personnels bien entendu :-D) .