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Croatie Romans

Mater dolorosa – Jurica Pavičić

Traduction du croate par Olivier Lannuzel – Agullo Éditions

C’est avec un plaisir non dissimulé, mais aussi une pointe d’appréhension que j’ai ouvert Mater dolorosa, le dernier roman du Croate Jurica Pavičić. Car j’ai énormément aimé 2 de ses précédents opus : L’eau rouge et Le collectionneur de serpents. J’avais donc beaucoup d’attentes – et la crainte d’être déçue. Verdict : je suis définitivement fan !

À partir du meurtre d’une jeune fille, Jurica Pavičić a une fois de plus écrit un formidable roman social et psychologique. Dans L’eau rouge, il nous plaçait du côté de l’enquêteur et de la famille de la victime. Cette fois, nous sommes toujours dans la tête d’un policier, mais aussi dans celle des proches d’un meurtrier. La mater dolorosa n’est d’ailleurs pas la mère qui pleure son enfant assassinée : elle est celle qui ne peut pas croire à la culpabilité de son fils et veut le protéger.

Split par Bruno de Pixabay

Dans ces 395 pages que j’ai tournées avec avidité, l’auteur évoque la famille qui protège et qui emprisonne, les rôles qui s’inversent entre parents et enfants, les conséquences physiques et psychologiques des guerres de Yougoslavie, la corruption qui règne dans tous les domaines en Croatie, les différentes facettes d’une Split vivant du tourisme tout en restant marquée par les vestiges du règne de Tito. Pas de course-poursuite ou d’arrestation spectaculaire, mais un roman noir fouillé et tendu comme je les aime et que je vous conseille.

Il ne me reste plus qu’à lire La femme du 2e étage et j’aurais épuisé la bibliographie déjà traduite de Jurica Pavičić. Pourvu qu’il continue d’écrire et Agullo de le publier !

Pour d’autres avis, c’est chez Alex, Violette, Luocine, et Aifelle.

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Le collectionneur de serpents et autres nouvelles – Jurica Pavičić

Traduction du croate par Olivier Lannuzel – Agullo Éditions

De Jurica Pavičić, j’ai déjà lu il y a quelques mois l’excellent roman policier L’eau rouge (mon avis sur Babelio est à retrouver ici). J’ai très vite repéré son recueil de nouvelles au titre mystérieux : Le collectionneur de serpents. Dans ces 5 récits, l’auteur aborde des destins individuels dans lesquels la guerre n’est jamais loin et se trouve même parfois au centre de l’intrigue.

La nouvelle éponyme est pour moi l’une des plus poignantes. Elle montre toute la banalité et le tragique du quotidien des soldats en temps de guerre, et surtout l’absurdité de voir de jeunes hommes arrachés à leurs vies pour aller affronter leurs voisins et vivre des atrocités. Ceux qui en reviennent ne seront évidemment plus jamais les mêmes, à commencer par le collectionneur de serpents.

La seconde nouvelle, Le tabernacle, m’a presque autant bouleversée que la première. Niko apprend un matin la mort de l’occupant de l’appartement familial qu’il a lui-même dû quitter à l’adolescence. Le partage des appartements était monnaie courante sous Tito et le locataire imposé à sa famille n’a jamais pu être délogé. Son décès permet enfin à Niko de revenir dans les lieux. Il y fait alors une étrange découverte qui l’ébranlera.

La patrouille sur la route retrace les destinées opposées de deux frères amoureux de la même femme. Une fois démobilisés, ils vont se retrouver chacun d’un côté de la loi : l’un gendarme, l’autre voleur. Tout cela risque évidemment de mal finir…

Les relations familiales sont elles aussi au cœur de La soeur. Si la guerre est plus lointaine dans cette nouvelle, elle explique en partie les liens distendus entre Margita et sa sœur, qui vit à Belgrade depuis de nombreuses années. Je l’ai trouvée plaisante à lire et juste dans l’analyse des sentiments, mais elle m’a moins touchée et me laisse un souvenir plus vague que les autres nouvelles du recueil.

Les lendemains de la guerre reviennent en force dans Le héros, le récit qui clôt le livre. Jurica Pavičić y crée une atmosphère digne d’un western : un personnage taiseux et solitaire vient travailler dans un village littéralement enroulé sur lui-même et largement laissé à l’abandon. Cet homme est-il bien celui qu’il prétend être ? J’ai été tenue en haleine jusqu’au bout par cette nouvelle qui fait ressurgir des événements très médiatisés des années 2000.

En résumé, je ne peux que conseiller ces très, très bonnes nouvelles de ce formidable auteur qui mêle avec talent récits intimes et histoire de son pays. D’ailleurs, son 2e roman policier, La femme du 2e étage, figurera sans aucun doute dans ma PAL 2024.

Aifelle et Kathel vous conseillent aussi ce recueil, lu pour Les Bonnes nouvelles également.