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Films et séries

Jeux de pouvoir – mini-série britannique

Disponible sur Arte.tv jusqu’à février 2024

Arte a la bonne idée de diffuser régulièrement des séries qui ont fait l’objet de remakes dans d’autres pays. J’ai ainsi eu l’occasion de voir ces dernières années House of cards version UK ou Hatufim, magistrale série israélienne qui a inspiré Homeland. Plus récemment, j’ai découvert Jeux de pouvoir, ou State of play en VO (c’est également le titre du film américain qui en a été tiré).

Dans cette mini-série en 6 épisodes, j’ai eu le plaisir de retrouver plusieurs acteurs et actrices britanniques que j’aime beaucoup, comme David Morrissey (le colonel Brandon de l’adaptation BBC de Raisons et sentiments en 2008), Kelly MacDonald (Nanny McPhee, La ruse…) avec un accent de Glasgow tout à fait croquignolet, ou encore le formidable Bill Nighy (Good morning England, Love Actually). Je ne connaissais pas John Simm, très convaincant aussi.

L’histoire : Un grand quotidien britannique enquête sur deux événements survenus le même jour à Londres et qui semblent indépendants au départ (mais qui, vous l’aurez deviné, sont en fait liés), en l’occurrence la mort d’un jeune homme noir criblé de balles dans une ruelle et celle d’une assistante parlementaire passée sous un métro. Corruption politique, poids des lobbies, indépendance (ou non) de la presse, tensions raciales, ambition professionnelle, trahisons en amour et en amitié, tous les ingrédients sont réunis pour quelques soirées rivé(e)s à son écran. La série a certes un peu vieilli sur le plan purement visuel (elle date de 2003). Pourtant, en quelques minutes, j’étais captivée par cette enquête journalistique et criminelle très réaliste et au rythme trépidant. La tension est constante, tous les personnages sont confrontés à des dilemmes éthiques dans leur métier de journaliste, parlementaire, policier, ou dans leur vie personnelle et les rebondissements se multiplient.

On aurait sans doute pu se passer d’une intrigue sentimentale qui n’apporte pas grand-chose, mais le reste du scénario est extrêmement bien ficelé. L’habituée des séries et romans policiers que je suis a été habilement embobinée puisqu’elle n’avait pas vu venir le dénouement de cette histoire. Le casting est exceptionnel, avec des seconds rôles géniaux (James McAvoy, Marc Warren…) et des personnages tous très fouillés. Je n’oublie pas non plus les touches d’humour que j’aime tant chez les Anglais et qu’ils savent distiller même dans un thriller comme celui-ci. Bref, Jeux de pouvoir est une série intelligente et rythmée à ne pas manquer.

PS : Pamolico a aimé cette série elle aussi, elle vous dit pourquoi ici : https://pamolico.wordpress.com/2023/03/12/jeux-de-pouvoir-paul-abbott/

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Danemark Romans

De l’argent à flamber – Asta Olivia Nordenhof

Traduction du danois par Hélène Hervieu, Les Argonautes Éditeur

Une toute nouvelle maison d’édition est née dans ma ville ! Sa vocation : mieux faire connaître la littérature européenne traduite. Une véritable manne pour la lectrice férue de romans étrangers que je suis. Je me suis donc jetée sur les trois premières publications des Argonautes Éditeur, à commencer par un roman danois annoncé comme politique et engagé : De l’argent à flamber. Traversé par la violence aussi bien sociale, financière, psychologique que physique, ce court roman est aussi, et surtout, d’une grande beauté.

Asta Olivia Nordenhof s’est lancée dans l’écriture de sept romans consacrés à l’incendie d’un ferry qui reliait la Norvège et le Danemark en 1990, un drame qui avait fait près de 160 victimes et secoué toute la Scandinavie. De l’argent à flamber est le premier de ces sept ouvrages, les autres étant encore à paraître (ndlr : d’après mes sources, l’écriture du deuxième tome vient de s’achever, j’ai hâte qu’il soit traduit et publié en français !).

Sans être un prétexte, l’histoire du Scandinavian Star ne forme pas le nœud de ce roman. En découpant son récit en plusieurs courtes parties, l’autrice mêle ses propres réflexions et recherches sur ces événements aux souvenirs de Kurt et Maggie, un couple dysfonctionnel dont l’histoire personnelle n’est qu’en partie liée à cet incendie d’origine criminelle. Maggie et Kurt n’y apparaissent d’abord pas sous leur meilleur jour et je les ai jugés peu attachants au début, voire parfaitement méprisable pour Kurt. Rapidement pour Maggie, plus tardivement pour Kurt, ils se révèlent d’une grande vulnérabilité et tout simplement humains. Leur solitude et l’immense tendresse dont ils sont capables m’ont profondément émue, en particulier leur amour pour leur fille Sofie.

De l’argent à flamber m’a « remuée » parce qu’il illustre avec brio les violences à petite et grande échelle, leurs conséquences et leur cycle sans fin, tout en insufflant une saine indignation. Le roman devrait être sombre, et il l’est aussi. Pourtant, je l’ai avant tout trouvé beau et lumineux. Asta Olivia Nordenhof appelle un chat un chat, et son style direct tient le drame à la bonne distance. Dans ce magnifique roman, elle sait capter les petits riens de la vie qui lui donnent sa beauté, et touche au cœur.