Traduit du bulgare par Marie Vrinat – Éditions des Syrtes
De Théodora Dimova, j’ai déjà lu le fantastique roman Les dévastés qui était entré dans mon TOP 10 de l’année 2023-2024. Eva m’avait alors conseillé un roman antérieur de cette autrice : Mères. Je me suis bien sûr empressée de me le procurer et il attendait sagement cette Rentrée bulgare pour enfin sortir de mes étagères.

Cette fois, Théodora Dimova s’intéresse à la Bulgarie postcommuniste à travers un petit groupe d’adolescentes et d’adolescents. Leur point commun : élèves dans une même classe, ils ont pour professeure Yavora qui exerce d’emblée une fascination totale sur eux. Cette jeune femme, à l’aura extraordinaire, semble exercer une influence salutaire qu’elle pousse d’ailleurs assez loin, allant jusqu’à aider financièrement et physiquement certains d’entre eux. En sa présence quasi magique, ces jeunes oublient leurs problèmes qui ne disparaissent pas pour autant, bien au contraire. Jusqu’au drame dont on sait qu’il s’est produit et vers lequel Théodora Dimova nous conduit peu à peu, le souffle court.
Le titre est très clair : Avec l’histoire de ces enfants, ce sont les relations avec leurs mères (et par rebond, de leurs parents entre eux) qui sont passées au crible. Reflets d’une société bouleversée par la chute du régime communiste, en proie à la corruption et à des inégalités criantes, ces mères sont aussi victimes de difficultés que les femmes peuvent connaître quel que soit le pays où elles vivent (désir d’enfant, santé mentale, divorce conflictuel). Les effets destructeurs sur la jeune génération sont très finement montrés et sont proprement bouleversants. Paru il y a déjà 20 ans, le roman nous laisse alors avec cette question lancinante qui fait écho à bien des événements récents : Qu’auraient pu faire ces mères, mais aussi la société tout entière, pour éviter les drames qui ont conduit à ce passage à l’acte ?

J’ai retrouvé l’écriture haletante et l’empathie que j’avais déjà énormément appréciées chez Théodora Dimova. J’ai été un peu moins touchée qu’avec Les dévastés, sans doute parce que les personnages sont ici plus nombreux et qu’on suit chacun d’eux moins longtemps. Mais la puissance et la sensibilité de l’écriture, sans parler du sujet d’une actualité brûlante, rendent cette lecture indispensable. Je vous recommande de lire également l’avis d’Ingannmic, marquée par ce roman elle aussi.

PS : L’édition grand format de Mères est épuisée, et sa version poche est apparemment en cours de réédition. Heureusement, vous pouvez toujours trouver sa version numérique, et peut-être un format papier dans l’une de vos bibliothèques. Sachez aussi que mon exemplaire fait partie des livres à gagner en participant à la Rentrée à l’Est !
17 réponses sur « Mères- Théodora Dimova »
Je note les dévastés, je ne suis pas sûre d’avoir déjà lu de littérature bulgare…
Théodora me semble une valeur sûre pour te lancer dans cette littérature !
Je l’avais noté pour ce rendez-vous bulgare, probablement motivée par le billet d’Ingannmic, mais le temps m’a fait défaut. A voir si je ne lirais pas plutôt Les dévastés un jour. L’écriture de cette autrice semble valoir le détour en tout cas. Manou en a lu un autre d’elle récemment et a été séduite par le style également.
J’aimerais bien arriver à lire un jour cette autrice ; on ne parlera jamais assez des dégâts de la Grande histoire sur nos petites vies. C’est au moins aussi important que nos histoires personnelles et on n’y peut pas grand chose.
C’est ce que j’aime beaucoup chez elle : à partir de vécus très personnels, on voit les conséquences de l’Histoire et des évolutions sociales.
J’ai plus envie de lire Les dévastés…
J’ai trouvé Les dévastés plus « mature » dans la construction, mais j’ai apprécié de trouver un sujet plus contemporain avec Mères, qui est très bien traité en plus
C’est tentant ! Je retiens pour dans le futur.
Je pense qu’il peut te plaire !
Je l’ai noté aussi, puis j’ai hésité. Quand j’ai choisi mes lectures, j’avais pas envie de choses trop dures, mais j’y reviendrai peut-être. J’ai l’impression qu’il y a comme un air de famille avec La Lumière vacillante de Nino Haratischwili. Décidément, pas mal de drames dans cette période.
Je n’ai pas encore lu La lumière vacillante, mais j’aime énormément Nino Haratischwili et Théodora Dimova, ce qui n’est sans doute pas un hasard. Je n’avais pas fait le rapprochement avant, mais leurs écritures ont beaucoup de points communs (des phrases très amples notamment) et leurs pays ont connu des périodes et régimes similaires évidemment.
Encore une autrice à découvrir. Malheureusement ce titre là sera difficile à trouver.
J’espère que sa réédition se fera en poche, cela faciliterait sa diffusion sans doute…
Mais ça à l’air passionnant ! Je note immédiatement les deux titres !
Je recommande en effet !
Merci pour cette découverte que je note autant pour le sujet que l’écriture.
Merci pour le lien ! Je suis heureuse de voir ce titre ici : comme tu le soulignes, il m’a beaucoup marquée, notamment par son écriture intense…