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Le goûter du lion – Ogawa Ito

Traduction du japonais par Déborah Pierret-Watanabe – Éditions Philippe Picquier

Avril, c’est aussi un Mois au Japon ! Les cerisiers sont en fleurs là-bas comme ici, mais aujourd’hui, ce sont les citronniers qui sont à l’honneur puisque Le goûter du lion a pour décor « l’île aux citrons », nichée dans la mer intérieure de Seto.

Derrière ce titre gourmand se cache en fait un roman sur la fin de vie. Shizuku est une jeune trentenaire en stade terminal d’un cancer. Elle a choisi de finir ses jours à la Maison du lion, un lieu dédié à l’accompagnement des personnes en fin de vie bien loin des hôpitaux et des EPHAD. À l’heure de grands débats nationaux sur les soins palliatifs, on rêverait de voir ce genre de structures essaimer chez nous…


« (…) j’avais l’impression de me retrouver dans un de ces hôtels cachés où plane une atmosphère d’élégance. L’endroit n’était ni trop impersonnel ni trop marqué par les traces de la présence des autres pensionnaires. On s’y sentait comme couvé du regard par un inconnu au visage souriant. Je ne suis jamais entrée à l’intérieur d’un cocon, mais j’ai pensé qu’on devait y trouver la même lumière, douce et enveloppante. »

Shizuku va connaître une sorte de renaissance à la Maison du lion. Elle s’allège de ses regrets, fait de belles rencontres, découvre la relation d’amour si forte qui peut unir un animal et son maître. Elle profite de chaque souffle d’air, de la lumière et de la moindre saveur (et nous met l’eau à la bouche !). Il n’y a pas d’amertume, pas de faux-semblants non plus. Shizuku apprend à accueillir la peur, la tristesse comme la joie.

Une fois de plus, j’ai été frappée par la capacité des auteurs japonais à parler simplement, sans pathos et sans tabou, de réalités peu réjouissantes (en l’occurrence, le corps qui lâche). Et la solitude dans laquelle vivent la plupart des Japonais, en tous cas si j’en crois la littérature et le cinéma, est prégnante ici aussi. J’ai d’ailleurs pensé à plusieurs reprises au très joli film Tempura dont l’héroïne fantasque et célibataire peine à occuper ses week-ends passés encore et toujours seule. Ici aussi, Shizuku est seule, par choix certes, mais elle semble avoir eu peu de proches dans sa courte vie.

J’avoue tout : j’ai eu les larmes aux yeux à plusieurs reprises ! Pourtant, l’impression qui domine et qui reste est celle d’une grande sérénité. C’est un joli roman sur la fin de vie, qui n’est peut-être que le début d’autre chose. Il ne révolutionne pas la littérature, mais il est idéal pour une parenthèse en mode carpe diem.

PS : Le Mois au Japon, ce sont des romans, des recettes, des films, des loisirs créatifs, des idées pour apprendre la langue japonaise. Retrouvez toutes les participations à ce rendez-vous chez Hilde et Lou.

25 réponses sur « Le goûter du lion – Ogawa Ito »

C’est effet très délicat, notamment dans les sentiments. Une chose que j’apprécie toujours beaucoup en littérature japonaise.

J’aime beaucoup la poésie et la sensibilité de la littérature japonaise. Pour ce challenge, je n’ai plus aucun titre dans ma Pile A Lire. Peut-être l’an prochain. Avec celui-ci, pourquoi pas ?

A vrai dire, je n’en avais pas non plus, mais le hasard a fait qu’on m’a offert ce roman il y a moins de deux semaines. C’était l’occasion rêvée.

Je viens de finir un roman sur le deuil, j’ai besoin d’un peu de légèreté. Mais je note ce livre pour plus tard, j’aime beaucoup ce que tu en dis.

Ce roman est dispo dans ma bibli de quartier. Il était d’ailleurs dans ma liste à lire mais… comment dire… j’ai envie d’en peu de légèreté depuis quelques temps.

Je comprends très bien ! S’il ne m’avait pas été offert et si cela n’avait pas été le mois du Japon, j’aurais sans doute évité le sujet moi aussi. Mais finalement, c’est plus une ode à la vie qu’autre chose, même si les moments difficiles sont inévitables vu le sujet.

Je l’ai trouvé émouvant mais pas larmoyant en effet. L’équilibre n’est pas facile à trouver avec ce genre de thème !

Je te rejoins complètement : je n’aurais sans doute pas ouvert le livre s’il n’avait pas été japonais (et avec cette belle couverture lumineuse 😉).

Je sais que le sujet devrait être traité avec toute la délicatesse nécessaire et cette pudeur toute japonaise que j’apprécie beaucoup, mais il me freine quand même. À sa parution, souvent je saisissais ce livre en librairie, très tentée (la couverture, le titre, et le Japon bien sûr), puis je le reposais en me rappelant du sujet. Peut-être que je finirai par le lire tout de même.

Bizarrement, je ne l’avais pas remarqué en librairie mais je suis contente qu’on me l’ait offert même si ça peut paraître bizarre comme cadeau 🤣. Il se trouve que la personne qui me l’a offert partage mon goût de la littérature japonaise contemporaine (je lui ai fait découvrir Mémoires d’un chat par exemple). En tous cas, il faut le lire si on s’y sent prêt. Le sujet n’est pas anodin mais il n’est pas lourd ou larmoyant.

D’un côté je suis tentée (un roman qui se passe sur une des îles de la Mer Intérieure), mais d’un autre le sujet me freine un peu. En même temps, tu fais référence au très joli film « Tempura »…
J’ai complètement perdu de vue le mois japonais, j’aurais dû en parler en publiant mon article sur « Au revoir les chats » !

Oh, c’est vrai, je n’ai pas pensé à te signaler moi non plus que ça entrait bien dans le cadre du Mois au Japon. Quant au décor de ce roman, ça m’a fait (superficiellement) découvrir cette région que je ne connaissais pas.

Madame Lit écrit : « Un livre très intéressant en effet… Il s’avère souvent difficile de parler des soins de fin de vie, mais ce livre semble le faire avec délicatesse, joie de vivre et humanisme malgré la solitude. Merci pour cette découverte! »

Aifelle écrit (WP me pose encore des problèmes) : J’ai aimé « la papeterie Tsubaki », mais nettement moins « le jardin Arc-en-Ciel ». Je retenterai peut-être avec le titre que tu chroniques.

Comme toi, je n’avais pas accroché au Jardin arc-en-ciel et beaucoup aimé La papeterie Tsubaki. Le sujet est encore très différent ici, et traité avec délicatesse.

J’ai lu ce roman l’an dernier et il m’a marquée. Je continuais d’y penser bien après la lecture. Au delà du côté touchant et émouvant, j’ai été impressionnée par cette délicatesse, cette simplicité et cette manière d’aborder un sujet aussi difficile. Certaines lectures peuvent être tellement douloureuses. J’en relis un en ce moment, sur le deuil, qui me crève le cœur.

Je pense qu’il me fera le même effet. L’air de rien, il reste présent à l’esprit, sans être douloureux alors que le sujet l’est, sûrement grâce à cette simplicité et cette délicatesse dont tu parles. Et accessoirement, il donne très envie de découvrir la mer de Seto et sa multitude d’îles (il y a une super site touristique qui permet le voyage par procuration d’ailleurs).

j’ai déjà lu une critique sur c livre, et c’est vrai que mourir dans une île où on put profiter de la nature jusqu’au dernier moment est assez tentant.

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