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BD et romans graphiques Porto Rico

Et l’île s’embrasa – John Vasquez Mejias

Traduction de l’anglais (États-Unis) par Julien Besse – Lettrage par Isabelle Le Roux - Éditions Ici-bas

Repéré chez Doudoumatous, Et l’île s’embrasa m’a permis de prolonger ma découverte de Porto Rico après la lecture il y a quelques mois de La maîtresse de Carlos Gardel (dont Ingannmic a prévu de parler aujourd’hui). Un lettrage frappant, des graphismes étonnants faits de gravures et un titre augurant d’événements dramatiques : cet album graphique atypique est un ouvrage passionnant sur le fond comme sur la forme.

John Vasquez Mejias revient ici sur « L’histoire méconnue d’une révolution à Porto Rico », un embrasement qui a secoué l’île en 1950 et qui visait à la libérer du joug américain. J’y ai par exemple appris que les Portoricains ont la citoyenneté américaine, ce qui a permis de les enrôler pour aller combattre en Europe ou en Corée notamment, ou encore que le président états-unien Harry Truman avait échappé à une tentative d’assassinat par des révolutionnaires portoricains en 1950.

J’y ai fait la connaissance d’hommes et de femmes aspirant à l’autodétermination et prêts à s’engager, hésitant entre la non-violence prônée par Gandhi ou des méthodes armées à la Michael Collins. Leaders politiques, simples citoyens et citoyennes, ils et elles ont espéré et se sont battus. Leur révolte fut durement réprimée avant d’être oubliée, y compris par le peuple portoricain.

Retrouvez des romans et autres lectures de tout le continent sud-américain chez Ingannmic pendant tout le mois de février. De quoi mettre un peu de soleil dans notre hiver !

Les gravures de John Vasquez Mejias sont denses, sombres et, en un mot, superbes. J’avoue que leur richesse m’a obligée à passer plus de temps sur chaque image que je ne le fais habituellement pour une BD. Mais si cet album me tentait autant, c’était justement pour sortir de mes sentiers battus et explorer un style graphique original. L’histoire peut sembler un peu complexe aussi et j’admets avoir été un peu perdue entre certains personnages par moments. Ceux-ci nous sont cependant présentés en détail à la fin du récit, avec un résumé de l’histoire de Porto Rico et une interview de l’auteur. J’ai d’abord regretté de ne pas avoir lu ces explications avant, mais finalement, je préfère cet ordre. J’ai pu me plonger pleinement dans le dessin avant d’approfondir le contenu. Puis j’ai fait une 2e lecture qui m’a donné d’autres perspectives.

Je suis en tout cas parfaitement d’accord avec Doudoumatous : Et l’île s’embrasa est un véritable objet d’art.

PS : Un référendum devait avoir lieu en novembre 2023 sur le statut de Porto Rico (indépendance vis-à-vis des USA ou non) mais je n’ai pu trouver aucune information sur son résultat ou sa tenue. Il faut croire qu’il a été reporté, ce qui doit en arranger certains…

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Porto Rico Romans

La maîtresse de Carlos Gardel – Maya Santos-Febres

Traduction de l’espagnol (Porto Rico) par François-Michel Durazzo – Éditions Zulma

Une première lecture d’Amérique latine pour mon blog ! Je vous invite aujourd’hui à découvrir un roman foisonnant, sensuel et dépaysant autour de la rencontre (a priori imaginaire) entre le mythique Carlos Gardel et une jeune Portoricaine tiraillée entre son héritage de guérisseuse et son ambition scientifique.

Mon nom est Michaela Thorné et je suis une femme qui se souvient. Avant cela, j’ai été bien des choses : une jeune élève infirmière, la petite-fille d’une vieille guérisseuse, la protégée du docteur Martha Roberts de Romeu. J’ai aussi été la maîtresse de Gardel.

C’est sur ces trois phrases que s’ouvre ce roman passionnant et passionné. Il y sera question du racisme subi par la population noire de Porto Rico, et d’Amérique latine en général, de la connaissance subtile des plantes médicinales qu’avaient les natifs de ce continent, du pillage des ressources par les Occidentaux, du rôle de cobayes joué par les Portoricains et les Portoricaines pour les laboratoires et médecins américains. Bien sûr, il y sera également question de tango, de chanson, mais aussi de Toulouse (car Carlos Gardel serait né sous le nom de Charles Gardes dans la Ville rose), de Buenos Aires évidemment, de Paris ou encore de New York et de son Spanish Harlem.

Mayra Santos-Febres a une écriture vibrante, exubérante et précise à la fois. Elle parvient à entrecroiser le parcours d’une jeune femme qui se cherche et se construit avec celui d’un Carlos Gardel toujours tombeur, mais en bout de course. On ressent la chaleur des corps, la touffeur de l’air et la luxuriance de la nature, tout comme le dilemme de celles et ceux qui veulent échapper à leur destin de misère.

Une très belle découverte, à la fois d’un pays à l’histoire coloniale lourde et victime d’innombrables fléaux, d’un personnage de légende (qui se résumait pour moi surtout à un nom et à un costume de faux gaucho à paillettes), et enfin d’une formidable écrivaine.

PS : Le blog se met en pause estivale. Retour le 21 août ici et dans vos messageries ! Bel été et à bientôt !