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Le maître a de plus en plus d’humour – Mo Yan

Connaissez-vous Mo Yan, lauréat du Prix Nobel de littérature 2012 ? C’est Doudoumatous qui m’a rendue curieuse de découvrir cet auteur extrêmement prolifique (il a quelque 80 essais, nouvelles et romans à son actif). J’avoue que l’idée de pouvoir ajouter la Chine l’an prochain à la carte des pays visités avec ce blog a pu jouer (vu la surface occupée par son territoire, ce sera visuellement très satisfaisant !).

Autant par hasard (trouvaille en bouquinerie) que par sécurité (je suis très novice en littérature chinoise), j’ai opté pour Le maître a de plus en plus d’humour (moins de 100 pages). Doudoumatous ayant envie d’explorer plus avant la bibliographie de Mo Yan, elle s’est jointe à moi pour cette lecture et vous pourrez donc trouver son avis sur son blog aujourd’hui.

Pour ma part, je ne m’attendais pas à une critique aussi franche de la Chine moderne et c’était très réjouissant ! Dans Le maître a de plus en plus d’humour, les entreprises ont subi rachat sur rachat, les directeurs s’en mettent de toute évidence plein les poches tandis que même les ouvriers modèles se retrouvent à la porte du jour au lendemain. Les chômeurs sont livrés à eux-mêmes et la police est corrompue, bref ce n’est pas la joie dans la République populaire.

« Le maire adjoint s’en alla au volant de son Audi, suivi du directeur de l’usine dans sa Santana rouge, et même le directeur adjoint partit, tout débraillé, au volant de sa Cherokee blanche. Après tout ce tapage, chaque ouvrier se dirigea vers son destin. Lü Xiaohu pissa un grand coup contre le panneau d’affichage, puis il déclara à Lao Ding qui se tenait appuyé contre un arbre : « Maître, allons-y, ce n’est pas en restant ici qu’on trouvera de quoi manger, quand le père est mort et que la mère est remariée, c’est chacun pour soi ! » »

Seule une initiative audacieuse digne d’un start-uper (qui sait saisir l’air du temps et optimiser une solution jusqu’alors gratuite) permettra à Maître Ding de subsister et même de connaître une aisance inédite pour lui. Mais en bon élève du maoïsme, il est taraudé par la culpabilité face au succès de son business plan

Ce court roman a des airs de conte : il est émaillé de proverbes, son héros est un vieil homme naïf doté d’un apprenti bien plus dégourdi qui lui enseigne le b.a.-ba du commerce, et surtout c’est l’histoire d’un homme intègre et pauvre qui doit sa survie à l’abandon de ses valeurs (voilà pour la morale). Moi qui aime beaucoup les contes, je l’ai donc lu avec plaisir. Je vous le recommande pour une initiation en douceur à la littérature chinoise !

40 réponses sur « Le maître a de plus en plus d’humour – Mo Yan »

Je ne connais rien à la littérature chinoise et ça pourrait me tenter. Je vais noter ce titre. Merci.

Votre lecture commune est très tentante d’autant plus que je n’ai encore rien lu de cet auteur que je ne connais que de nom…ce pourrait être l’occasion, ce « roman-conte » a l’air amusant en plus.

moi j’avais bien aimé ses nouvelles « le coureur de fond » je lirai ce livre si je le trouve en médiathèque

Merci à toi pour cette lecture partagée. Ton enthousiasme fait plaisir. J’aime beaucoup l’humour de l’auteur mais je comprends que son style ne plaise pas à tous lecteurs. Mo Yan aime jouer les ingénus. Cela ne l’empêche pas pour autant de présenter une critique féroce de la société chinoise contemporaine.

Il faut sans doute s’habituer à la tournure d’esprit de Mo Yan, mais cette première tentative était réussie.

Comme je disais chez Je lis, je blogue, je l’ai lu il y a vraiment longtemps, près de 20 ans, mais j’en garde encore un bon souvenir, bien que pas dans les détails. Cela dit, en relisant mon billet de l’époque, je n’avais visiblement rien compris à l’humour du maître.^^

Je n’ai pas trouvé ton billet, n’hésite pas à m’envoyer le lien. En fait, le maître n’a pas vraiment d’humour, c’est son attitude naïve qui fait dire à son apprenti qu’il a de l’humour. C’est donc plutôt ironique 😉.

Comme je l’ai écrit chez Doudoumatous, c’est un auteur que j’ai « testé », notamment avec un gros pavé de 1000 pages.. et je n’ai pas du tout accroché, j’ai trouvé le style très plat…

Sur 100 pages à peine, c’est très bien passé et j’ai trouvé ce roman plutôt « enlevé ». Le style plat est quelque chose qui m’a gênée dans mes précédentes tentatives de lecture chinoise en revanche. C’est peut-être donc une sorte de courant littéraire local ? En tout cas je vois bien de quoi tu parles et sur 1000 pages, quel pensum ça devait être (j’espère que tu avais abandonné avant la fin).

Je l’ai découvert grâce à Doudoumatous qui a déjà chroniqué au moins un roman de lui. Avant ça, je n’en avais pas entendu parler non plus. Pourtant il ne doit pas y avoir énormément de nobelisés chinois…

J’espère que tu vas vite retrouver le titre. C’est comme une chanson qui reste dans la tête sinon, ça devient vite très agaçant !

J’imagine que pour critiquer ainsi la chine contemporaine, l’auteur n’y vit plus ? En tout cas, avec son petit nombre de page et ton enthousiasme, ce roman pourrait m’inciter à aller faire un tour littéraire du côté de la Chine.

A vrai dire, je pense qu’il y vit bel et bien car si j’en crois sa fiche WIkipedia : « Son intelligence et son interprétation de la Chine contemporaine expliquent sans doute pourquoi il n’a jamais été encore censuré — à l’exception de certains passages lors des premières éditions de Beaux seins, belles fesses. ». Certains lui ont aussi reproché son « manque de solidarité et d’engagement vis-a-vis des autres écrivains et intellectuels chinois réprimés et/ou mis en détention en violation de la liberté d’expression reconnue par la constitution chinoise ». Il réussit visiblement à contourner les limites imposées par les autorités chinoises, au risque d’une certaine ambiguïté politique.

Si tu aimes les nouvelles, il en a publié beaucoup et elles sont peut-être plus accessibles que ses pavés, apparemment plus clivants.

J’ai emprunté La dure loi du karma à l’époque où l’auteur a reçu le prix, mais malheureusement j’ai dû le rendre faute de temps après n’avoir lu que quelques dizaines de pages (que j’ai trouvées très bien et j’en déduis que l’humour de Mo Yan pourrait bien me plaire).

Le titre de ce roman est prometteur et me semble bien correspondre à ma première impression du style Mon Yan. N’hésite pas à retenter!

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