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La fabrique des salauds – Chris Kraus

Traduit de l’allemand par Rose Labourie – Éditions 10/18

Il fallait bien 1000 pages pour ce roman qui balaie 70 ans d’Histoire et nous emmène de Riga à Munich en passant par Moscou, Poznań ou encore Tel-Aviv. Un dénommé Koja Solm y raconte à la première personne comment lui, petit-fils de pasteur et de baron allemands du Baltikum, est devenu membre des SS avant d’enchaîner les rôles et les identités. Très accessible et extrêmement difficile à reposer, ce roman est une vraie brique (heureusement disponible en poche) qui ne devrait pas alourdir votre sac bien longtemps 😉.

Si certains faits m’étaient connus, j’en ignorais aussi énormément, et pas des moindres. J’ai donc été abasourdie plus d’une fois à la lecture de ce pavé qui se dévore comme l’excellent roman d’espionnage et la puissante fresque historique qu’il est, mais aussi parce qu’il est écrit avec un humour noir ravageur. Rien (ou pas grand-chose) ne nous est épargné des horreurs du nazisme et de la Shoah en particulier, des tortures pratiquées à la Loubianka, des coups bas entre hauts responsables et des compromissions politiques toutes époques et tous pays confondus. Heureusement, la plume alerte de Chris Kraus nous tient de bout en bout. Quel brio aussi bien à l’écriture qu’à la traduction !

Jouet du destin, opportuniste, incurable romantique ou parfait salaud ? Koja Solm est sans doute tout ça à la fois et/ou successivement. Ce personnage ô combien romanesque n’est pas né seulement de l’imagination de l’auteur. Par ailleurs et même avant tout cinéaste, celui-ci s’est en effet inspiré de biographies stupéfiantes de plusieurs hommes ayant bel et bien existé, comme il le précise dans sa postface. Je vous recommande d’ailleurs la lecture de ces quelques pages dans lesquelles Chris Kraus fournit une intéressante bibliographie et explique que la question « Comment la société de la République fédérale d’Allemagne a-t-elle réussi à trouver le chemin de la démocratie en dépit de l’intégration des anciens nazis ? » a été le moteur de son roman. Je ne suis pas sûre que le roman réussisse à y répondre, mais il n’en est pas moins passionnant.

Petite satisfaction toute personnelle : Ce roman m’a permis de renouer avec des lieux et des événements découverts lors de mes lectures baltes l’an dernier puisque la première partie de La fabrique des salauds se passe en Lettonie. Il a aussi rejoint l’intrigue juridique de L’affaire Collini (un roman que j’ai lu mais pas chroniqué, contrairement à Patrice). Grâce à ces différentes lectures, je commence à pouvoir relier plusieurs fils de l’Histoire allemande et européenne qui m’échappaient 💪.

Je ne suis pas la seule à avoir aimé cet « épais pavé », comme vous le constaterez avec les billets d’Ingannmic, Jostein ou encore de Kate et Frida et de La jument verte. Jostein a également lu Danser sur les débris du même Chris Kraus et je constate que les personnages sont eux aussi issus de la famille Solm. Autrement dit, un livre est sorti de ma PAL mais un autre va très vite y entrer !

PS : Ce roman de très exactement 1074 pages me permet de participer aux Pavés de l’été chez Sibylline et aux Épais de l’été, défi organisé par ta d loi du cine sur le blog de Dasola.

16 réponses sur « La fabrique des salauds – Chris Kraus »

J’ai le même problème, mais là, c’est passé tout seul. C’est terrible à dire vu le sujet du roman, mais c’est aussi ce qui le rend brillant : on rit beaucoup !

Bien tentant ! Dommage, il n’est pas au catalogue de ma médiathèque. Mais je céderai peut-être lors d’un passage à la librairie, surtout s’il existe en poche !

1000 pages ! et pourtant j’ai très envie de le lire . Bien sûr qu’il faut comprendre tout cela mais … 1000 pages ça me freine un peu !

Je suis à peu près sûre que tu aimerais. Les 1000 pages me rebutaient et il a fallu la motivation du challenge des Épais pour le sortir de ma PAL. En quelques pages seulement, j’étais ferrée et mon intérêt ne s’est pas émoussé. Il faut lui donner sa chance, on ne le regrette pas !

Absolument tout pour me plaire, sauf la taille. J’envisage de lire cet été « Les Bienveillantes », donc tu imagines mon état si j’y ajoute ce salaud-là en plus !

Plus de 1000 pages ! Je ne pense pas que j’aurai le courage de lire un tel pavé sur ce sujet. De Chris Kraus, j’ai lu « Femmes d’été, femmes d’hiver » qui est quand même plus léger.

Ca se lit comme un polar, je l’ai englouti en deux semaines (assez intenses quand même 🤣), mais j’étais contente de passer à des romans courts ensuite !

Oh wow, bravo pour ces 1000 pages ! Ce roman est en vague projet de lecture depuis sa parution, mais oui, c’est un beau pavé, il faut pouvoir le caser. Ton billet me remotive bien cela dit, alors je ne désespère pas.

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