Catégories
Angleterre Romans

Toute passion abolie – Vita Sackville-West

Traduction de l’anglais par Micha Venaille – Le Livre de poche

Voici ma deuxième chronique proposée dans le cadre du #Moisanglais de Lou et Titine grâce auquel vous pourrez découvrir une foule de romans, mais aussi des recettes (« coronation quiche » en tête), des films, des podcasts…

Dans Toute passion abolie, Lady Slane, âgée de 88 ans, décide de vivre enfin pour elle-même au lendemain de la mort de son mari. Lasse des faux-semblants et des obligations familiales ou mondaines, elle s’ouvre à de nouvelles amitiés choisies, savoure le calme retrouvé et se souvient de ses aspirations de jeune femme.

La plume de Vita Sackville-West est une merveille d’élégance et son regard sur la place des femmes, l’ambition humaine et la vieillesse est d’une grande modernité. Ce court roman aux accents mélancoliques, mais malicieux aussi, fait partie de ces livres que l’on prend plaisir à lire et à relire à différentes périodes de sa vie car ils sont une source inépuisable de réflexion.

Des pensées choquantes, peu naturelles, l’avaient souvent traversée. « Si seulement je ne m’étais pas mariée… si je n’avais pas eu d’enfant… » Pourtant elle aimait Henry – jusqu’à en mourir. Elle aimait ses enfants – jusqu’à la sentimentalité.

En quelques lignes, Vita Sackville-West résume par exemple merveilleusement le dilemme qui peut assaillir les femmes et mères de famille tiraillées entre leurs aspirations personnelles, les injonctions sociales et leur amour pour leurs proches.

Toute passion abolie n’est pas pour autant un pamphlet féministe et Lady Slane comme ses nouveaux amis ont un recul délicieux, ironique et plein de sagesse sur la vie. C’est sans amertume que cette ancienne vice-reine des Indes se retourne sur son passé, même s’il est émaillé de regrets, et elle savoure chaque jour sans craindre la mort qui approche mais qu’elle voit comme « la grande aventure à laquelle nous préparent toutes les autres. » Il est rare de lire une vision aussi sereine de cette période si particulière qu’est le très grand âge et j’ai trouvé ça particulièrement rafraîchissant.

Vita Sackville-West (quel nom flamboyant, digne d’une héroïne de roman d’aventures !) m’a séduite et je compte bien continuer à explorer son œuvre, pourquoi pas avec la correspondance qu’elle a entretenue avec Virginia Woolf chroniquée par Fanny récemment ?