Traduit du lituanien par Marielle Vitureau – Éditions de La Table ronde
Je suis ravie d’ouvrir cette Rentrée à l’Est avec un roman lituanien qui s’est déjà taillé un beau succès que je comprends désormais très bien : L’impératrice de pierre est un roman historique enlevé et incarné qui m’a en plus énormément dépaysée. Livonie, Sémigalie, Latgalie, Rzeczpospolita polono-lituanienne, que de noms exotiques (pour vous, je ne sais pas, mais pour moi indéniablement) ! Nous sommes en 1727 : Sur son lit de mort, une impératrice se repasse le film de sa vie (désolée pour cet anachronisme) et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle a été mouvementée.
En suivant Marta Helena Skowrońska, née dans une famille lituanienne mais dans une ville du sud de la Lettonie actuelle, on rencontre d’éminentes personnalités de son temps dont je n’avais jamais entendu parler (ce qui ne veut pas dire grand-chose, mes connaissances historiques concernant la Russie et les pays baltes étant très limitées). Parmi pléthore de personnages, on côtoie brièvement ou longuement le pasteur allemand Johann Ernst Glück, qui fut le premier à traduire la Bible en letton, Alexandre Danilovitch Menchikov, favori et éminence grise du tsar Pierre Ier, le tsar lui-même, souverain épileptique soucieux de moderniser son pays tout en étant incapable de se défaire de ses habitudes rustres et excessives en tout.
Après avoir subi de nombreuses ignominies, Marta devient Catherine, maîtresse de Menchikov puis du tsar Pierre Le Grand, futur empereur (je ne divulgâche rien, c’est dit très tôt dans le roman). Elle est restée dans l’Histoire l’impératrice Catherine de Russie, moins célèbre que la Grande Catherine (II) malgré son destin assez incroyable (et forcément romancé car les sources manquent sur la première partie de sa vie en particulier). Son regard d’Européenne sur cette Russie arriérée et violente des 17e et 18e siècles est très intéressant et j’ai lu ce roman avec autant de facilité que de plaisir malgré mes lacunes en Histoire. Je me suis surprise à naviguer ensuite d’une page de Wikipedia à une autre pour en savoir plus sur les différents personnages, les régions évoquées, les conflits mentionnés car le sujet a beaucoup attisé ma curiosité. Ces incursions en milieu encyclopédique n’ont cependant pas été nécessaires en cours de lecture, le roman se suffit à lui-même et il offre une fresque passionnante qui éclaire le raisonnement d’alors, et sans doute d’aujourd’hui, de nombreux dirigeants russes.
« À l’en croire, toutes les terres qu’il convoitait étaient russes « depuis des temps immémoriaux » – qu’elles soient finlandaises, estoniennes, livoniennes, courlandaises, tatares, ou même les khanats musulmans. À côté de ça, il négligeait les coins les plus reculés de son propre royaume. »
Le tome 2 de L’impératrice de pierre a paru en octobre dernier et j’ai bien l’intention de le lire très bientôt. Fabienne et Ally ont d’ailleurs un temps d’avance sur moi puisqu’elles ont déjà chroniqué les tome 1 et 2 de cet excellent roman historique.