Traduction du suédois par Anna Postel – Éditions Autrement
Ce roman résonne singulièrement alors que s’achève l’été le plus chaud qu’ait connu la France. Si vous souffrez d’éco-anxiété aiguë, mieux vaut sans doute passer votre chemin. Car à partir de l’expérience de quelques protagonistes pendant des méga-feux, Jens Liljestrand nous fait vivre de l’intérieur ces catastrophes naturelles qui se multiplient depuis plusieurs années. Avec ce roman fiévreux et haletant, il nous alerte sur la bombe à retardement humaine et sociale que la crise climatique représente.
Au cinéma, on parlerait de « film catastrophe », avec tout ce que cela suppose de suspense. On pourrait se croire dans une dystopie, mais c’est bien de notre époque qu’il s’agit et l’auteur n’a pas vraiment besoin d’imagination pour décrire les réactions que provoquent la peur, la faim, le besoin de protéger sa famille, bref l’instinct de survie ou encore la colère face à l’inertie des responsables politiques devant le réchauffement climatique. L’Histoire nous a malheureusement assez prouvé de quoi les humains sont capables dans ce genre de circonstances. Et c’est sans doute cet aspect que nous n’avons pas encore assez anticipé quand nous parlons des conséquences du changement climatique. Jens Liljestrand se charge ici, de manière magistrale, de nous ouvrir les yeux à ce sujet.
C’est en effet un tableau sans concession que l’auteur brosse de la société suédoise (et occidentale en général). Ses personnages ont tous leurs forces et leurs failles, certain(e)s sont touchant(e)s, d’autres plutôt agaçant(e)s, voire inquiétant(e)s. On a ainsi un communicant aux idées écolo qui ne vit pas toujours en accord avec ses valeurs et dont le couple traverse une crise majeure ; son ancienne maîtresse, influenceuse anti-éco-anxiété accro à l’oxycodone ; le fils désœuvré d’une ancienne gloire internationale du tennis qui vit ce qu’Alain Souchon appellerait l’« ultra-moderne solitude » ; et enfin une adolescente adepte de la fast fashion qui fera preuve de ressources insoupçonnées.
Cette variété de points de vue permet de révéler les divisions de nos sociétés face aux effets du changement climatique et aux situations de crises en général. Roman apocalyptique aux portraits psychologiques d’une grande justesse, La forêt brûlera sous nos pas est un véritable thriller social. Ouvertement militant, il garde l’espoir que nous saurons nous montrer à la hauteur de l’enjeu et sauver ce qui pourra encore l’être, c’est-à-dire rester capables d’humanité.
Pour découvrir d’autres romans du Nord de l’Europe, sur des sujets très variés, je vous recommande de faire un tour sur le blog de Céline qui a lancé un passionnant challenge « Auteurs scandinaves ».
19 réponses sur « Et la forêt brûlera sous nos pas – Jens Liljestrand »
Très tentant ! Je l’avais noté à sa sortie, puis d’autres l’ont poussé loin, loin… à ne pas perdre de vue !
L’avantage d’avoir attendu, c’est qu’il vient de sortir en format poche 😀
Le titre ressemble étrangement à ce que nous avons vécu cet été au Canada. Nos belles forêts ont brûlé sous nos pas. Quelle catastrophe! Il y avait du smog des incendies jusque chez moi… Épouvantable. Pour le moment, je ne veux pas replonger dans cet événement horrible. Merci pour la découverte!
Je te comprends, ce serait sans doute trop anxiogène de revivre ça dès maintenant, même par le biais de la littérature !
Ce titre m’intrigue depuis sa sortie…
C’est ce qu’on appelle un page-turner. J’ai trouvé ça bien fichu pour parler de ce sujet qui peut être vite « donneur de leçon ».
Je l’avais repéré aussi à sa sortie
J’ai l’impression qu’il a été assez médiatisé, le sujet étant très en phase avec l’actualité des dernières années.
L’édition en « J’ai Lu » est donnée pour 608 pages… éligible donc aux challenges estivaux sur les « gros bouquins »… qui se clôturent demain samedi 23 septembre!
Si le coeur vous en dit, vous connaissez le jeu: logos + liens + nous en prévenir… 😉
(s) ta d loi du cine, « squatter » chez dasola
Malheureusement pour moi, la version brochée n’avait même pas assez de pages pour les pavés de Sibylline… mais ça ne m’a pas empêchée de le dévorer en quelques jours !
Je lis peu de thriller social mais le côté militant m’attire beaucoup !
Alors il te plaira sûrement!
[…] Sacha– Danemark : De l’argent à flamber de Asta Olivia Nordenhof – Le pays des phrases courtes de Stine Pilgaard– Norvège : Une famille moderne de Helga Flatland– Islande : La tristesse des anges & Entre ciel et terre de Jón Kalman Stefánsson– Suède : Et la forêt brûlera sous nos pas de Jens Liljestrand […]
C’est vrai que c’est anxiogène, et en même temps tellement important d’en parler.
Exactement ! Et ce roman rendant les choses très concrètes, il est plus efficace que bien des discours.
Ca a l’air très intéressant même si ce n’est pas un sujet par lequel je suis attirée à lire… je dois reconnaître qu’il est quand même important d’en parler.
Merci encore pour ta participation à mon challenge.
Au-delà du message écologique, il y a un portrait de la famille suédoise et de la société plutôt décapant. Le franc-parler nordique sans doute !
la dimension militante pourrait me plaire mais ça doit être flippant tout de même !
Oui, un peu mais c’est aussi une intéressante peinture sociale qui dépasse le thème initial.